Un petit poème
Lia écrivait dans son petit carnet.
De petits textes sans grand intérêt.
La maîtresse la laissait lire
à la classe.
Sans mots dire .
Sans emphase.
Jusqu'à hier.
Hier la maîtresse lui refusa
la lecture d'un prétendu poème.
Une prose relevant
du langage oral très hypothétique,
incommodant le sens, l'oreille et même la syntaxe.
La maîtresse dit à Lia qu'elle restait collée au sol avec des textes très terre à terre,
qu'elle devait laisser pousser ses ailes
pour s'envoler, toucher le beau du bout des doigts.
Parfois la maîtresse donne des images pour paroles.
"Je ne parle pas de vraies ailes, Lia!"
et Lia regardait la maîtresse avec un sourire entendu
même si la maîtresse doutait de l'entendement.
Aujourd'hui, à 16h15, alors que la maîtresse se demandait
si boucler un séance de sciences en 10 mn était envisageable,
Lia se leva et mit sous ses yeux,
avec un "je peux le lire",
une page noircie de son carnet ,
une page qui commençait par
"je suis une fleur du passé ",
une page qui stupéfia
puis charma la maîtresse.
Une page comme un cadeau,
qui signait le début d'une métamorphose.
Une page qui semblait offrir à Lia
la paix et la sérénité.
La classe fut prise en otage entre 16h30 et 16h31
pour une raison impérieuse :
la naissance d'une poétesse.
c'est sûr : la maîtresse redemanderait,
dans la semaine, de multiples lectures de ce poème.
Pour que Lia, la petite fille hérisson,
puisse toucher ses camarades
du bout du coeur.
Sans les mordre.