En septembre
A la fin de sa réunion, la maîtresse a lancé un " on se voit ? " à la maman d'Eliot
La maîtresse voulait comprendre:
Elle a regardé
cette grande et belle femme s'asseoir...
Elle a senti qu'elle pourrait pleurer.
Mais ça n'effraie plus la maîtresse,
les larmes des autres.
Une maman qui, en juin, ne voulait pas
que son fils soit dans cette classe.
Car, Eliot est, aurait-elle dit au téléphone,
un élève tumultueux, à tenir d'une main de fer.
Alors la maman a raconté, à mots couverts, l'année passée chez la collègue.
Une année faite de vexations, d'humiliations de la part de l'adulte.
Une année faite des larmes, de cauchemars, de peurs, de maux de ventre.
La maman a parlé de la psychologue qu'Eliot a eu la chance de rencontrer.
La maîtresse l'a rassurée : " Cette année sera différente."
Sa classe est, pour certains, un lieu de convalescence ....
Peu à peu la maman a libéré la parole; Elle a presque tout dit.
Le tremblement des lèvres disait combien tous ces mots la blessaient .
Tous les mots prononcés l'an passé à l'encontre de son fils.
La maîtresse a compris pourquoi certains parents n'osaient lutter contre les humiliations,
pourquoi les parents de Marc ont tu les persécutions:
la peur des représailles dans le lieu clos de la classe.
La maman a dans son sac une bombe (juste la vérité qui pourrait éclater)
La maîtresse a révélé son rdv planifié avec l'inspecteur,
elle a dit que les dossiers,même explosifs,devaient être transmis
pour que plus personne ignore les larmes des enfants pétris par les adultes.
La maîtresse a entendu un silence. Elle a voulu savoir.
Pourquoi cette maman ne voulait-elle voir son fils dans sa classe ?
En juin,on aurait rapporté à Eliot et à ses parents que "la maîtresse était méchante ."
La maîtresse sait combien les élèves sont fidèles à leur instit,sa collègue.
Elle sait que ces paroles ne viennent pas des enfants.
Elle prend conscience que cette collègue parle dans son dos.
Qu'importe: le sourire de ses élèves suffit à rétablir toutes les vérités
que, seules, les jalousies peuvent tenter d'éroder.
Mais la maîtresse a poursuivi , elle est allé au delà des apparences,
elle a parlé d'un travail pour elle, la maman.
ce n'est pas que cette histoire terrifiante qui explique cette fragilité .
" Votre fils ne risque rien cette année...Cette fragilité, ça me rappelle moi, il y a quelques temps, quand j'emmenais ma fille chez la psy. Nous, les parents, nous voulons les protéger nos mômes et on ne réussit pas toujours. On voudrait être tout puissant contre le mal . Quand on n'a pas réussi à leur épargner cette souffrance on se sent coupable. Mais ça réveille des culpabilités plus anciennes..."
La maman sourit. elle accepte ses mots, elle parle d'un travail .
Oui, certainement. Un travail à terminer