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brèves de classe
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30 octobre 2013

des histoires à foison

 

 

Les poèmes à foison  ne font pas d'ombre

                    aux histoires qui naissent dans la classe.

Tous les matins les élèves écrivent dans leur petit cahier 

                                     - cahier d'écrivain ou cahier du matin - .

     Un cahier pour lier la pensée et l'écrit,

          un cahier qui réduit la distance entre l'esprit et la main,

               entre la grammaire et l'écrit intime, la vie et la classe.

Tous les 15 jours, chaque élève choisit  un texte, qui sera annoté par la maîtresse dans la marge, corrigé par l'enfant, recorrigé par la maîtresse puis réécrit au propre et illustré. Un texte qui va remettre en jeu les connaissances en français.

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Un cahier qui a prouvé à court et long termes son efficacité. Rare expérience vécue par les élèves que la liberté d'écrire, la liberté de lire un texte à ses camarades, la liberté d'en refuser l'accès aux parents ou à la maîtresse.Un cahier très fort dans lequel palpite l'âme des enfants. Quelques-uns  ont essayé de se soustraire aux 15 minutes d'écriture quotidienne: parfois fleurissent quelques rosaces que la maîtresse admire avant de rappeler la fonction de ce cahier. D'autres y mettent tout leur cœur, sans pouvoir s'arrêter, écrivant clandestinement sur leurs genoux pendant  les maths ou le français.

Corollaire de la poésie, la prose s’épanouit:

Entre Malvin le grand dyslexique qui prétend s'ennuyer pendant ces 15 min, qui - poussé, épaulé  par un camarade- finit par écrire  l'histoire d'un enfant rencontrant de grandes difficultés à l'école et relevant courageusement  la tête, surmontant ses difficultés.         Toute l'histoire de Malvin...

Gabriel témoigne de ses nombreuses passions telles que les voitures, les fusées, les avions . Dans les histoires de Ludovic, les hommes chassent les dragons, des sorciers se livrent bataille...Et puis Gabriel entame l'écriture d'un long récit relatant les péripéties d'un astronaute stagiaire tandis que Ludovic présente, avec la verve du journaliste,les derniers jeux vidéos.

Comme si les écrits des uns influençaient les écrits des autres...

12902829-close-up-portrait-d-39-une-fille-qui-ecrit-hispanique-mignonne-sur-son-cahier-d-39-ecolierCelles de Rose évoquent l'amour d'un roi pour sa reine (celle-ci se fait enlever et sera délivrée par son mari chéri) ou le divorce de parents .Rose qui ne voit plus son père - un papa qui envoie un courrier réclamant l'envoi du  bulletin scolaire de sa fille. Rose qui vit seule avec sa maman.

Une bouffée de son passé lui revient fugacement. La maîtresse. Elle aussi enfant du divorce. Dans son corset de culpabilité, sans liberté d'exprimer son désir de vivre malgré les hostilités... Heureusement qu'elle a un lieu pour parler de l'enfant qu'elle a été, elle. Un endroit où déposer ses angoisses de petite fille. Un lieu qui soulage ses élèves de ses projections à elle, un lieu qui lui permet d'entendre les besoins de Rose en grammaire et ses questions sur la vie. Pas ses propres besoins anciens à elle, l'adulte . Un lieu qui lui permet, enfin, de prendre son métier avec légèreté.

Enfant-écrivantRose, l'excellente élève qui doute atrocement,

qui éprouve tant de difficultés à entrer

dans la lecture de textes longs           

(peur de se retrouver face à soi même?).

Rose qui trottine jusqu'au bureau de la maîtresse pour lui adresser un:

                                                                                                                                                                                                              -   

- Je ne sais pas comment expliquer, dans mon  histoire, 

quand la maman annonce à ses enfants

qu'elle et son mari vont divorcer.

De quoi rester sans voix!

- Comment expliquer le divorce? C'est bien compliqué tout ça!

Comment expliquer la séparation des parents?

Comment expliquer que les gens ne s'aiment plus?

Comment elle t'a expliqué, ta maman?       

- Je le savais déjà!        

- Et bien, peut-être que les enfants de ton histoire s'en doutent eux aussi...non?

Rose regagne sa place avec une petit moue au coin de la lèvre.

Cette réponse ne lui convient pas.

La maîtresse sait que ces textes parlent d'eux mais elle ne le leur dit pas sauf quand cela peut les éclairer. Elle s'intéresse exclusivement à la grammaire et à la conjugaison.Oralement, elle ou les camarades font parfois une remarque quant à la formulation, à la compréhension. Elle anticipe sur quelques notions (les temps du récits, les différents verbes dans les incises). Elle utilisera les textes de Rose pour travailler le discours direct.

Introduire de la rigueur, ne serait-ce pas aussi un bon moyen de prendre du recul avec ce qui nous habite?                                                                                     

Hippolyte retrace les escapades de son chat fugueur et les aventures de la famille partie à sa recherche.          

Eleanor  écrit l'histoire de deux adolescents amoureux puis celle d'un garçon qui veut être célèbre tandis que sa sœur, elle, rêve d'une vie simple, " une fille qui ne veut pas grandir ". Les enfants sont-ils tiraillés entre le désir d'une  vie exposée à la télé, admirée, enviée et la vie ordinaire, simple ancrée dans la réalité.

Mike a écrit deux histoires plutôt sanglantes - mais ce sont les règles du jeu- .Son voisin précise timidement : "ses histoires me font peur"

- Écoute, Mike, écoute ce qu'il te dit! Attention à la sensibilité des autres !

La maman, courageuse, est seule avec deux garçons et Mike, l'aîné, a des soucis avec les règles de la maison et de la classe, avec les règles de grammaire et de conjugaison!

Et puis , un matin, apparaît un texte qui dénote, un texte sur son petit frère.

"C'est pas vraiment mon frère " avait-il dit, fin septembre, à la maitresse qui avait rectifié : "Un demi-frère. Mais celui avec lequel on partage sa maman, avec lequel on joue, on se chamaille, voire se dispute ? Un frère, je trouve." Un frère qui, un temps, offrit à Mike un père de substitution .

Mike écrit : "Mon petit frère doit être un peu magicien,il est très fort pour deviner certaines choses...".

Mike tenterait-il de dompter les mots, d'apprivoiser sa violence intérieure?

La maîtresse a un faible pour l'histoire de Judith   qui relate l'histoire de Marcelle,

une fillette qui a des problèmes avec les maths et le français. Une fillette courageuse

qui devient finalement maîtresse. Une maîtresse anxieuse qui raconte son angoisse

la veille de sa première rentrée, une maitresse qui fait des maths et du français.

Une maîtresse qui a dans sa classe une petite fille qui s'appelle Marcelle.Comme elle.

Marcelle la maîtresse veut aider Marcelle l'élève.

La maîtresse est étonnée par cette histoire qui est toute son histoire à elle;

elle la maîtresse qui se penche sur ses élèves tentant de les aider ;

elle qui se reconnaît, elle enfant, dans chacun de ses élèves;

les difficultés en maths des uns ressemblent aux siennes,

les écueils en estime de soi des autres réveillent les siens;

elle, offrant ce qui lui avait fait, autrefois, défaut.....

Bien sûr la maîtresse  n'en a rien dit, elle n'en dira jamais rien.

              Mais cette Judith serait-elle douée pour lire dans les cœurs ?

 

 

La maîtresse aime tous ces récits qui prennent de la valeur

quand ils sont lus à tous, des récits qui mettent du sens à l'étude de la langue

Mais, secrètement, elle se sent comme une petite fille à qui on lirait des histoires.

 

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22 octobre 2013

Derniers changements en date

 

Il y a 15 JOURS,

Dernière modification en date:

La maîtresse a renoncé à une géographie ordinaire,

 

 

 

 

 

 

 

optant pour une organisation en groupe.


 

 L'an passé, elle a fait entrer les jeux dans sa classe.

Cette année, elle se sent prête à les institutionnaliser :

6 groupes de 4 à 5 élèves, 6 groupes qui tourneront sur deux jours :

3X 3 groupes le lundi et le mardi.

Déjà que Matéo grognait après son voisin Célien,

que va-t-il se passer maintenant avec 4 camarades autour de lui?

Matéo se plaignait fin septembre et

expliquait qu'il n'avait "jamais eu d'amis et

que personne ne voulait de lui."

La maîtresse l'avait toujours vu avec un seul et unique enfant, Nicolas;

tous deux oisifs lors des récréations avaient

pour seul moyen d'entrer en contact,celui de titiller les autres.

Matéo était même devenu  " le pire ennemi " du fils de la maîtresse.

Maintenant le voilà engoncé à sa place avec 4 camarades à se coltiner.

Deux jours de chamailleries, de doléances ont suivi. 

Et puis le troisième jour: 

 

Des rires, des grimaces, des jeux sous les tables.

La maîtresse observe,profite de ce vent qui tourne et

laisse le plaisir retisser les liens:

Un peu de complicité pour un enfant qui apprend à vivre au milieu de ses pairs...

Encore un jour ou deux avant de ramener ses élèves à plus de rigueur.

La maîtresse y croit!

Elle s'étonne toujours de la plasticité de son groupe classe,

elle découvre combien il est aisé de donner une place à tous les élèves.

Elle lutte, parfois, contre certains portraits au vitriol

dressés par ses collègues, pas consciemment malintentionnés.

Craindrait-elle d'être  influencée?

Elle garde une foi aveugle et

les erreurs qui émaillent la vie sociale des élèves

(les erreurs dont les enseignants sont la mémoire)

ressemblent, parfois, ... aux nôtres.

Notre sévérité à l'égard des autres ne serait-elle pas

le regard au vitriol sur nous-même,

sur les erreurs qu'on ne saurait voir en toute conscience?

 

 

 

 

 

 

 

 

19 octobre 2013

poèmes à foison


Les poèmes naissent jour après jour dans le coeur des élèves

les poèmes se pérénisent noir sur blanc

dans les cahiers du matin.

La maîtresse leur a laissé un lieu où se montrer:

les 4 vitres de la classe donnant sur la cour.

La classe s'habille de vers et

sous ses fenêtres, les élèves de l'école

viennent lire les petits poèmes

corrigés, recopiés, enluminés, collés .

La maîtresse en lit toujours et encore:

du Baudelaire, du Verlaine, Hugo et toute la clique

pour le plaisir de l'ouïe et du coeur.

Lecture à 13h30 d'un poème

puis, lors de l'appel,

les élèves donnent

un mot du poème.

UNE ANNÉE FRUCTUEUSE S'ANNONCE....

 

 

 

11 octobre 2013

Louis

Louis n'écoute pas en classe. Le travail n'est pas fait.

la maîtresse l'observe à la dérobée:

Louis est un enfant qui porte un masque :

pas l'ombre d'un sourire, ni trace d'une quelconque émotion.

Pendant les maths, Louis regarde le plafond

et, en français, devient oiseleur   .

Pourtant, ses textes du matin

sont dignes d'un cm2, prolixes et ciselés.

L'utilisation d'un de ses textes

en conjugaison semble

ne lui avoir fait ni chaud ni froid.

Ni motivé  pour la tâche scolaire.

Afin d'étancher sa curiosité,

alors que les autres s'affairent,

la maîtresse demande à Louis de venir au bureau

" Louis on dirait que tu es dans la lune en classe,

c'est vrai ou c'est pas vrai?

- Oui, c'est vrai

-  On dirait que tu as du mal à te mettre au travail !C'est ou c'est pas vrai?

- Oui c'est vrai...

- On dirait même que tu essaies d'échapper au travail, non?

Louis hoche tristement la tête

- et pourquoi c'est difficle pour toi de te mettre au travail?

Soudain les yeux de l'enfant semblent en plein naufrage;  

elle voit Louis devenir tout rouge

comme quand l'émoi arrive au triple galop tout en tentant de contrôler sa course.

La maîtresse fait doucement pivoter Louis afin de soustraire son visage 

à ses pairs au labeur et elle entend quelques mots accompagnant les larmes:

" Parce que j'ai peur de me tromper"

La maîtresse tente de le rassurer:

" Tu sais, on est en classe pour apprendre et quand on apprend

et bien, des fois, on se trompe! Si tu ne travailles pas

tu ne pourras pas apprendre tout ce qu'il faut savoir

et ça va poser problème......"

Durant le reste de la journée, Louis a travaillé.

Elle se souvient....

Cette petite conversation suffira-t-elle à le remettre sur le chemin du travail?

 

9 octobre 2013

Judith et Camille


Pendant le chant d'Eléanor,

Judith et Camille  ricanaient au fond de la classe.

Malgré la tristesse qui en émanait.

Parfois, quand on est mal à l'aise,

quand on sent  la tristesse s'insinuer en nous,

ricaner permet de lutter intérieurement contre cette tristesse 

qui pourrait nous envahir entièrement.

 " Les filles, est-ce que vous ricaniez parce que vous étiez mal à l'aise en écoutant Eléanor?"

Les filles acquiescent, relèvent la tristesse des mots et les rires cessent.

Eléanor temine son tour de chant sans moqueries.

Pourquoi, peu après cette conversation, Judith demande-t-elle à la maîtresse

si elle aime le chocolat ?

"Et puis les bonbons aussi, maîtresse, tu aimes bien les bonbons?"

La maitresse taquine la miss :

" Tu n'essaierais pas d'acheter un bon bulletin avec des chocolats ! "

La maîtresse ajoute :

" C'est pour dire que tu sens bien dans la classe? "

Judith répond par l'affirmative....L'hypothèse est approuvée.

Finalement, ces petits bonheurs sont les douceurs les plus tendres au coeur.....

 

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7 octobre 2013

Gabriel

Gabriel occupe beaucoup de place dans la classe. Et ce, depuis le début de l'année.

" Un peu comme à la maison, prendre toute la place,

pour ne pas laisser d'espace aux autres,

comme avec  la petite soeur?"

hasarde vainement la maîtresse

Gabriel est bavard, oui il le sait

et il le revendique haute et fort.

Il avait raconté à la maîtresse qu'il était resté,

toute l'année dernière, seul à une table

et sa maîtresse le punissait parfois pendant la récréation.

Toute la journée, la maîtresse l'a rapelé à l'ordre :

" Gabriel! arrête de parler ! Gabriel ! Tu as oublié qu'on devait lever le doigt ?"

Et cet après midi, la maîtresse a le sentiment de stigmatiser Gabriel.

Toujours lui, toujours dans le même rôle.

Alors elle a demandé son élève

qu'elle a coincé entre la vitre et une miss pas trop pipelette:

" Tu n'en as pas marre d'être celui qui parle tout le temps,

tu n'en as pas assez de cette image négative qu'on te renvoie tous les ans?

d'être celui à qui on dit arrête de parler, arrête de te lever !!

tu n'en n'as pas marre de revendiquer d'être bavard ,

tu m'as dit que tu as toujours été ainsi

mais c'est faux, on peut toujours changer"

La maîtresse a vu, oui elle a bien vu :

les yeux de Gabirel se mettre à briller, à se remplir de larmes,

son sourire disparaître pour laisser place à une expression nouvelle.

Elle a bien vu le grand bavard ne plus trouver ses mots,

touché...

Ensuite, lors de la lecture libre, elle l'a vu s'asseoir avec son livre

au pupitre d'appoint au fond de la classe. Elle l'a vu lire calmement

sans chercher à bavarder avec Roxane, ni au dessus de la boîte à livres.

Y aurait-il quelque chose en train de germer ?

Il faudra en rediscuter...

 

4 octobre 2013

Louis dans la lune

Louis est un élève d'une timidité maladive.

Un enfant qui sourit au théâtre mais qui se tient en permanence voûté, comme s'il souhaitait ne pas être vu.

Les timides sont les élèves que la maîtresse aime tout particulièrement, ceux qui lui rappellent la petite souris qu'elle était, elle, enfant  à l'école. Elle aimerait tant les sortir de leur torpeur.Mais ses élèves , les plus grands de l'école, déjà en armure, ne sont pas toujours accessibles aux mots pansements de la maîtresse.

En classe, Louis parle peu, sourit peu, travaille peu.

Dans les quelques travaux, avec une écriture sèche , irrégulière et pas toujours lisible, Louis ne semble pas capable de remobiliser des connaissances élémentaires telles que les verbes du 1er et 2ème groupes au présent.

La maîtresse l'observe à la dérobée:

Louis regarde le plafond pendant les maths ou par la fenêtre en français .

Alors la maîtresse le hèle :

" Louis, tu es dans la Lune, il faut atterrir! "

Louis  sourit gentiment à sa maîtresse : il en a toujours été ainsi durant toute sa scolarité.

Pourquoi ne le laisse-t-elle pas poursuivre son grand sommeil ?

Et puis, ce jeudi à 8h47, elle découvre que le cahier du matin de Louis se noircit à vue d'oeil.

Avec son autorisation, elle y jette un œil et elle découvre avec stupéfaction un long texte, une histoire composée de plusieurs chapitres. Une histoire de chevalier qui chasse les dragons. Un chevalier malin qui finit toujours vainqueur de ses combats contre les monstres grâce à des objets. Un texte digne d'un CM2 de début d'année avec une jolie écriture ronde . Un texte qui jure avec le travail fait en classe.

Alors la maîtresse s'étonne. Avec emphase. Comme d'habitude quand elle veut provoquer un choc positif:

" Mais je ne comprends pas Louis ! Ce travail est magnifique! Quelle belle écriture! Et l'orthographe est bien, très peu d'erreurs,juste parce que tu n'as pas relu. on voit que tu sais écrire pas mal de mots, tu as du vocabulaire, peu d'erreurs de conjugaison! Rien à voir avec tes exercices! Moi quand je regarde tes cahiers, je me dis que tu es en difficulté. Quand je regarde ton cahier du matin, je me dis que Louis a un bon niveau en français, il sait faire plein de choses!"

Louis se tortille.

La maîtresse trouve que ce texte tombe pile poil dans sa programmation;

elle demande à Louis l'autorisation d'utiliser son grand texte pour le travail de classe :

Le texte est tapé et

les élèves devront conjuguer

les verbes entre parenthèses au présent.

 

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